Quand, il y a à
peu près un an, je me suis inscrit à mon premier concours de brassage amateur
de bière, je n'avais qu'une idée en tête : faire de mon mieux. Un an plus tard,
un premier prix en poche, j'ai envie de raconter à quel point ça n'a pas été un
chemin de tout repos.
Une saison quoi?
Une parfaite bière d'été, malgré sa couleur. |
C'est quoi une saison noire? Bières et plaisirs
décrit la saison comme :
[...] une Ale blonde aux reflets orangés, habituellement bien coiffée et présentant une bonne effervescence. Elle est bien houblonnée, épicée et fruitée, offrant une finale sèche aigrelette et surtout rafraîchissante. Autrefois faible en alcool, elle propose de nos jours des pourcentages plus élevés.
La saison noire
doit répondre à cette définition... mais être noire.
Le défi, c'est donc de la noircir. Pour qu'une bière soit
noire (ou foncée), il faut généralement utiliser un malt qui a été torréfié (il
existe d'autres façons de faire, que je n'aborderai pas ici, puisque je les ai
découvertes après le concours). Il n'y a donc pas de problème, vous dites-vous,
ne suffit-il pas d'ajouter de ces grains pour noircir? Non. La saison noire ne
doit pas perdre son côté fruité et rafraîchissant. Elle ne doit donc pas avoir
le goût d'un Stout ou d'un Porter. Pas de goût de rôti, pas de goût de café, pas
de chocolat...
Et puis, les levures de saisons n'apprécient pas tout à fait
les grains fortement torréfiés et ont tendance à développer des saveurs
particulières (pas toujours agréables) en leur présence.
Je ne savais pas encore tout ça
Toute cette belle théorie, je l'ai apprise en faisant de la
recherche. Quand je me suis inscrit, n'ayant pu trouver d'exemple commercial
répondant à la définition du style, je me suis d'abord tourné vers une solution
simple : un mélange.
Je me suis acheté une saison et un stout et j'ai commencé à
faire des assemblages pour trouver la proportion idéale qui permettrait de
garder le profil de la saison et la couleur du stout. Bien que le goût ait été excellent
et que la couleur ait été parfaite, quelles qu'aient été les proportions, le malt
torréfié (ou rôti) volait la vedette.
La solution facile, le mélange de deux bières, était donc
exclue.
La levure idéale
À la vue de ces premières expériences, j'ai décidé d'attaquer
le problème un jour à la fois : d'abord designer une bonne saison, la foncer
par la suite.
Sachant que le goût particulier des saisons était grandement
influencé par sa levure, j'ai conçu une recette de saison assez classique
(orge, blé, amertume très légère) conçue pour mettre de l'avant le caractère de
la levure. J'ai commandé (5 de 4 producteurs) et cultivé des levures (2, à
partir de bières qui me plaisaient) pour finir avec 7 résultats différents.
Après la fermentation et l'embouteillage (et une dose
immodérée d'impatience), mon partenaire de brassage et moi nous sommes assis
pour une dégustation à l'aveuglette où une à une les levures ont été éliminées,
jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'une. Une seule levure avait rendu la bière assez
sèche, assez fruitée, légèrement poivrée, sans arrière-goût de fermentation difficile.
C'était la Belle saison de Lallemand.
Je tenais ma levure, restais à concevoir la saison parfaite.
Prochain épisode : le premier brassin.